• La pluie...averses incessantes...

    rideau liquide crépitant sur l'inextricable frondaison de la jungle Laotienne...la pluie de mousson...douche tiède qui ne laisse que peu de répit...qui vous enlève toute chance de sécher et vous cantonne dans un univers moite aux relents de pourriture et de végétation décomposée....

    Luang Prabang ...la cité royale , la ville au 65 pagodes ...noyée sous le déluge de cet été 72 ; désertée de sa population fuyant une autre mitraille , un autre déluge...de feu celui là.....encore tenue par une poignée de soldats loyalistes Hmongs de Xieng Khouang...cernée par le Pathet Lao et le Vietminh....étrange ambiance...étrange cohabitation avec ces petits hommes verts armés jusqu'aux dents qui nous regardent avec un ahurissement incrédule ,  photographier sous l'illusoire protection de nos K-ways des merveilles d'architectures ou de sculptures qu'on ne leur a sans doute jamais appris à voir...surréalisme de notre situation qui nous pousse à bénir cette avalanche céleste qui nous permet , l'espace d'une courte trêve , de nous évader de la sécurité de l'hôtel et de ses interminables partie de cartes avec des journalistes des quatre coins du globe coincés comme nous entre l'eau et le feu...bienheureuse inconscience de notre jeunesse qui nous promène sur un champ de bataille avec l'inébranlable conviction d'être à l'abri des obus sous la protection bienveillante des Dieux de l'ART...



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  • C'est parti...
    la grande évasion...le rush des Juilletistes...l'appel du sable et des grands horizons...le train de banlieue s'emplit de valises à roulettes et sacs à dos sous l'œil torve et vaguement envieux de ceux qui vont bosser , ceux qui restent...ceux qui vont devoir s'adapter à la tyrannie des horaires d'été...attendre un bus qui n'arrive pas...chercher LA boulangerie ouverte...LA pharmacie de service.....la rue déserte aux volets fermés....les retardataires qui chargent leurs voitures à ras bord , comme un parfum d'exode , ..les malins qui ont attendu le lundi pour bien montrer qu'ils ne dépendent pas d'une location ...les sages qui ont su éviter la cohue ....qui vous laissent plantés là sans un regard d'adieu vous abandonnant à l'indigence estivale des programmes télé ou aux errances aléatoires sur des blogs de plus en plus désertés....
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    Un mois...un mois et quatre jours et ce sera mon tour...la voiture piaffe déjà d'impatience...toute prête à dévorer les kilomètres...


     


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    J'ai tapé Google Images...

    puis la ville de mon enfance que je reconnais si peu...
    on croit souvent le temps arrêté sur le souvenir des lieux ,
    hélas il n'en n'est rien ,
    ils ont leur vie propres et continuent d' évoluer au fil des années
    pour devenir la nostalgie de quelqu'un d'autre..

    J'ai fait défiler les images à la recherche de parcelles de passé pas trop altérées , seul le ciel semblait intact sur la plupart des clichés...les mêmes nuages lourds aux reflets gris ardoise...de ces mêmes ardoises brillantes aux toits de la ville....la statue de Napoléon , fidèle au poste au centre d'un environnement qui m'est devenu étranger...la basilique Sainte Trinité un peu plus loin et des réminiscences de communion solennelle....le port de pêche devenu plaisance ...je me demande s'il y flotte encore son odeur de marée , de varech et coaltar mêlé...le cri déchirant des mouettes au ras d'écume...la sirène du pont-tournant.....
    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Je me suis arrêté sur celle-là.....la digue du Homet....
    une vague d'émotion venue du tréfonds du subconscient...le ciel n'était pas bleu ce jour là...mais lourd et chargé comme le plus souvent...la mer n'était pas étale mais moutonneuse ponctuée de petites gerbes mousseuses annonciatrices de gros temps.....je chevauche mon randonneur flambant neuf en direction du fort à l'extrémité des kilomètres de digue...et puis le vent se lève...la mer de plus en plus houleuse vient frapper avec violence les rochers en contrebas...la lumière décline , les bourrasques de plus en plus violentes menacent de m'envoyer à l'eau , je n'arrive plus à rouler droit , ma machine devient incontrôlable...je décide de faire demi-tour...je roule au plus près du parapet pour me protéger du vent...c'est alors que brutalement les éléments se déchaînent , la pluie torrentielle en mitraille...la houle transformée en vagues monstrueuses qui s'écrasent contre le granit en explosions d'écume....j'ai peur et trouve refuge dans un abri taillé dans le muret...j'y glisse mon vélo et ma carcasse trempée...assis sur mes talons , grelottant autant de froid que d'angoisse je guette l'accalmie à travers les cataractes de cet enfer liquide... en écrivant ces lignes j'ai encore le goût saumâtre des embruns qui me remonte aux lèvres.....

     

     


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    La Grande Guerre a marqué la collectivité nationale
    car aucun des conflits qui l'ont précédée n'a été aussi meurtrier
    et n'a endeuillé autant de familles .
    Aucune guerre n'a suscité non plus une telle floraison de monuments.
    Cette floraison représentera aussi le marché du siècle
    pour quantité d'architectes , de sculpteurs , de fondeurs ou de marbriers.
    A partir de 1919 et jusqu'au début des années trente ,
    la quasi-totalité des communes Françaises érige un monument aux morts..

    Lors de mes nombreux déplacements

    aux fins fonds de notre beau pays ,
    j'ai toujours été sidéré autant que fasciné
    à chaque rencontre de l'un de ces monuments
    dans le plus petit village , dans le plus ignoré des hameaux...
    parfois superbes...magnifiques...émouvants ...grotesques ou ridicules...
    quelquefois touchants de naïveté ,
    mais toujours empreints d'une telle émotion qu'il est impossible de s'en moquer...

    Que dire de celle qui m'a saisi en lisant mon propre nom
    en lettres dorées sur un côté du socle en granit de celui de Port-Bail.....
    ou l'infinie tristesse en larmes de pluie , sous un ciel  désespéré , de celui de Barfleur...




     


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    « Qu'est-ce qui m'a foutu un pareil pot d'tabac....t'as l'air d'un lolosse !!! »

    Papa a raison ,

    cela va bientôt faire une semaine que je n'ai pas rendu visite au coiffeur . Il surveille ma progression capillaire avec beaucoup plus d'attention que l'évolution de mon carnet de notes , une certaine forme de déformation professionnelle...il me plaque une main sur la tête , m'emprisonne les mèches entre les doigts , et me fait sentencieusement remarquer que si j'étais l'un de ses matelots , j'aurais droit à une semaine au trou , pas un cheveu ne doit dépasser des phalanges , le règlement c'est le règlement , il n'y a pas à discuter.... exécution !!!

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>Mr. Sanchez se retourne au tintement aigrelet de la clochette alors que je pousse la porte vitrée de son salon de la rue Hippolyte de Tocqueville .

    «  Ah c'est toi , assied-toi , i'en ai pour oune minoute , i'é fini monsieur , et l'é m'occoupe dé toi ! « 

    <o:p> </o:p>Mr. Sanchez est un réfugié de la guerre d'Espagne , le visage bronzé sillonné de rides profondes , le cheveu noir lustré de brillantine , une fine moustache à la Errol Flynn , il adore me raconter ses souvenirs même si je ne comprend pas le quart de ce qu'il dit....je l'aime bien , notre rencontre hebdomadaire finit par tisser des liens , il parle sans arrêt , un mégot collé au coin des lèvres , une cigarette neuve coincée derrière l'oreille qui attend que la place se libère , d'une curieuse voix rauque que lui-même attribue à l'excés de tabac .

    <o:p> </o:p>Comme d'habitoude ??...C'est çà , comme d'habitoude , une brosse ultra-courte , bien dégagé derrière les oreilles....je déteste çà , j'ai les oreilles décollées , quand je sors de chez lui on les voit encore plus , çà me fiche des complexes , maman m'affirme qu'il n'y a que moi qui le remarque , mais je suis sûr qu'elle ment ou alors elle est aveuglée par son amour maternel .

    C'est vite fait , quelques coups de ciseaux , le cliquetis de la tondeuse glacée qui se promène sur ma nuque , le cylindre de gomina bien gras qu'il me frotte énergiquement du front vers l'arrière du crâne pour maintenir le poil bien dressé , la balayette qui me chatouille le cou pendant qu'il écarte d'un doigt le col de ma chemise , le miroir qu'il promène fièrement de bas en haut et de gauche à droite pour me faire admirer une œuvre que je n'ose pas regarder....il me débarasse de la blouse à larges manches qu'il secoue consciencieusement sur les gens qui attendent , m'aide à descendre du fauteuil , me brosse partout une dernière fois , m'ouvre la porte...
    «  Tou dira bonïour à ton papa dé ma part ! »

    <o:p> </o:p>Je rase les murs , je vois en coin mon reflet dans les vitrines , je me trouve ridicule , j'ai honte , il faut absolument que je demande à maman de m'acheter une casquette...

     



     


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